L'AVIS DE L'ANSES


La 5G utilise deux bandes de fréquences. La première a donné lieu à versement de 3 milliards d'euros des opérateurs à l’État. L'attribution de la seconde permettra également des rentrées de fonds conséquentes. Pour l’État, il n'est pas question de remettre en cause le processus !


La 5G est censée permettre une connexion sans précédent pour les usines, les véhicules autonomes, et pour les particuliers, une plus grande rapidité de chargement des jeux et des vidéos.


D'après un article du Monde, pour les usages courants d'internet, il n'y a aucune différence. Le chargement de jeux ou de vidéos est plus rapide en 5G dans seulement 60% des cas. L'envoi de fichiers est plus lent en 5G qu'en 4G.


Mais pour les fabricants, c'est la perspective d'un renouvellement plus rapide du parc de téléphones. Et pour les opérateurs, celle de vendre des forfaits plus chers. Qui est gagnant dans cette opération ?


Pour asseoir ce déploiement sur des arguments irréfutables, le gouvernement a demandé à l'ANSES un avis, pas sur la pertinence du déploiement, mais sur les éventuels effets sanitaires de ces nouvelles bandes de fréquences. L'ANSES est une agence d’État. Cet avis ne devait pas remettre en cause le discours gouvernemental.


La page 5G du site de l'ANSES donne un article de présentation, résumé de l'avis, et un lien vers le texte de l'avis.


L'article titre « Pas de risques pour la santé ». On n'en attendait pas moins de cette agence étatique. En fait, le titre complet fait apparaître quelques bémols : « Pas de risques nouveaux pour la santé au vu des données disponibles ». Il y aurait donc des risques anciens ? Il ne serait pas exclu que des données complémentaires remettent cet avis en cause ?


Le texte de l'article introduit un nouveau bémol : « Il est peu probable que la 5G présente de nouveaux risques ». Voilà qui relativise encore le « pas de risques » du titre ! Et l'ANSES d'avancer la nécessité de poursuivre les recherches. Cela peut sembler une attitude de bon sens. Remarquons toutefois que la mise au point d'un nouveau médicament nécessite une Autorisation de Mise sur le Marché. C'est d'ailleurs le sens du principe de précaution, introduit dans la Constitution. Pourquoi pas dans le domaine de la téléphonie mobile ? Pourquoi faut-il que nous prouvions les effets sanitaires de ces ondes ? Pourquoi n'est-ce pas aux opérateurs de prouver leur innocuité ?


L'agence s'est rendu compte qu'avec une demande d'avis alors que le processus était déjà bien en marche, le gouvernement lui a fait un petit dans le dos. On trouve en page 19 de l'avis : « l'ANSES rappelle qu'il est souhaitable que le déploiement de technologies nouvelles soit soutenu par la réalisation d'études des liens entre exposition et impacts sanitaires préalablement à leur déploiement. »


En page 9, on lit : « Aucun résultat d'étude scientifique s'intéressant aux effets éventuels sur la santé de l'exposition aux champs électromagnétiques spécifiquement dans ces nouvelles bandes de fréquences [aucun résultat d'étude scientifique, donc] n'est actuellement disponible. » Le groupe de travail constitué pour instruire le dossier a donc bidouillé à partir d'études sur d'autres bandes de fréquences, en extrapolant leurs résultats et en espérant que les conclusions qu'il en tire ont quelque validité scientifique.


De la même façon, page 4, on apprend qu'« une expertise s'intéressant aux effets cancérogènes des radiofréquences est en cours d'instruction à l'ANSES ».


Page 12, on lit enfin que « l'intermittence des signaux des technologies sans fil [ce que l'on appelle couramment les ondes pulsées] pourrait influencer l'ensemble des réponses biologiques. Ceci n'a été jusqu'à présent que peu investigué, et reste un questionnement dans l'évaluation des risques sanitaires. »


Résumons : l'ANSES dit qu'il n'y a probablement pas de nouveaux risques sanitaires, mais c'est parce qu'on ne sait rien sur l'effet des nouvelles fréquences, et qu'en ce qui concerne les fréquences déjà utilisées, on ne sait pas non plus : à l'ANSES, nous n'avons trouvé aucun effet sanitaire. Mais si vous nous dites que d'autres en ont trouvé, il faut faire de nouvelles études ! Et pas prendre en compte celles existantes. Retardons, atermoyons, et pendant ce temps continuons à développer les profits des entreprises concernées !


Et pourtant, les associations spécialisées ne cessent de faire référence à des études scientifiques. Celles-ci ont été rassemblées dans deux compilations : Bioinitiative, et Interphone.


Pour nous faire une opinion, évitons de croire celui qui se drape dans un discours scientifique, ou celui dont le discours conforte notre point de vue, mais cherchons par nous-mêmes à confronter les points de vue, à remettre en cause nos préjugés, à apprendre pour comprendre. C'est plus difficile que d'acquiescer à n'importe quel discours, y compris à celui que je tiens en ce moment, mais c'est le prix à payer pour se forger une opinion argumentée, qui a quelque chance d'influer sur le cours des choses.


A propos des ondes de la téléphonie mobile, on parle souvent de radiofréquences. Mais personne n'a jamais suspecté les ondes de la radio ou de la télé d'être à l'origine de problèmes sanitaires. Avec la téléphonie mobile, il s'agit de micro-ondes pulsées.


D'abord, ce sont des micro-ondes. De la même famille que celles qui sont générées par les fours du même nom. Leur fréquence est telle qu'elle agite les molécules d'eau contenues dans la nourriture, ce qui se traduit par l'élévation de leur température. Pour éviter de faire cuire notre cerveau, les téléphones doivent réglementairement afficher leur DAS, leur Débit d'Absorption Spécifique. Plus le DAS est bas, moindre est le risque d'échauffement de notre cerveau.


Ensuite, il s'agit d'ondes pulsées. Ce caractère est utile pour qu'une antenne-relais puisse véhiculer simultanément de nombreuses communications. Mais en quoi cela pose-t-il problème ? C'est la question de la barrière hémato-encéphalique. Celle-ci est en place pour éviter que le cerveau ne soit envahi par des molécules qui n'ont rien à y faire. Le caractère pulsé des radiofréquences lève cette barrière. Il est pointé du doigt par les chercheurs qui travaillent sur la possible survenue de cancers du cerveau, ou de retards du développement mental chez l'enfant, en raison des ondes de la téléphonie mobile. D'ailleurs, l'avis de l'ANSES lui-même indique en page 14 que « les travaux sur membranes artificielles mettent en évidence des modifications à la fois structurales et fonctionnelles. »


Bien sûr, les représentants de l’État, des opérateurs et des fabricants vont se réjouir de trouver dans l'avis de l'ANSES ce qu'ils y cherchent : il n'y a pas de risques ! Les opposants sont donc des anti-science, des idéologues du retour à la lampe à huile ! C'était la fonction première de cet avis.


Bien sûr, on peut mettre en avant des passages montrant qu'en fait on ne sait pas grand-chose de ces effets sanitaires, parce qu'on n'a pas cherché, et qu'il conviendrait une autre fois de mettre les bœufs avant la charrue. Une autre fois... Pour la 6G peut-être.


N’acquiesçons pas à toute nouvelle technologie parce c'est moderne, parce qu'on nous la présente comme indispensable. La technologie est capable de produire des antibiotiques et des bombes atomiques. C'est la société qui doit décider ce que l'on met en œuvre.


Je vous remercie de votre attention.




Hervé CORNE

ASSOCIATION AGIR A VILLEJUIF