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Consultation sur l'eau potable en Île-de-France
projet d'installation du SEDIF (Syndicat des eaux d’Île-de-France)
dossier présenté par la CNDP (commission nationale du débat public)
Ceci est un premier essai d'analyse du dossier soumis à consultation. Il est basé sur la lecture de la « synthèse du dossier de présentation du projet » que l'on trouve sur la page de lancement de la consultation par la CNDP.
Voir : https://www.debatpublic.fr/eau-potable-idf/le-projet-en-bref-4054
Remarquons d'abord que la page de présentation de la consultation met en exergue l'élimination du chlore et celle du calcaire. Il faut prendre la peine d'examiner le dossier lui-même pour apprendre que la méthode projetée permettrait l'élimination des pesticides, et de leurs métabolites (leurs produits de dégradation), des PFAS (les polluants « éternels »), des résidus médicamenteux, des bactéries, même des virus… Tout au moins en grande partie, mais pas totalement. Et aussi d'apprendre que le chlore ne serait pas éliminé dans un premier temps, mais seulement après un temps de vérification, si l'ARS, l'Agence Régionale de Santé, donne son feu vert. Relativisons donc.
La filtration membranaire haute performance, encore appelée osmose inverse, nécessite de porter l'eau à une pression importante (jusqu'à 7 bars) pour la faire passer entre les pores d'un polymère, pores qui vont retenir les produits indésirables, en raison de leur taille, mais aussi d'un phénomène d'attraction électrique.
Un des problèmes posés, c'est que, si 85 % de l'eau injectée va être envoyée dans le réseau d'eau potable, 15 % va se retrouver chargée en polluants divers, impropre à la consommation, et va être « restituée au milieu naturel » comme il est dit pudiquement dans le dossier. En fait, rejeté dans la Seine pour ce qui concerne l'usine de Choisy. Certes, il est mentionné que ces 70 000 m3 par jour ne représentent que 1,3 % du débit du fleuve. Mais ce qui n'est pas mentionné, c'est que le déversement aura lieu en un seul point, et que les organismes vivants fixés là, ou y passant, bénéficieront d'une concentration maximum en polluants. Et les prédateurs qui s'en nourrissent. Et devinez qui est au bout de la chaîne ?
Un autre problème, c'est le coût de cette opération. 442 millions d'euros pour l'usine de Choisy, celle qui nous intéresse à Villejuif. Difficile de se faire une idée de ce que cela représente. Somme qu'il faudra amortir dans le temps de l'exploitation. Il y aura ensuite un coût d'utilisation au quotidien, notamment en ce qui concerne l'énergie électrique, en forte hausse par rapport aux modalités actuelles de traitement. Résultat : de l'ordre de 0,40 € par m3 pour les utilisateurs. C'est la poursuite de l'application du principe « pollué-payeur ». On pourrait penser que les surcoût de traitement de l'eau devraient être supportés par les principaux pollueurs, les tenants de l'agro-industrie, qui ne savent que mettre toujours plus de pesticides dans la nature, et dans leurs productions. Et en définitive, quand va-t-on se décider à traiter le problème à la source, en cessant de tuer le vivant pour produire une nourriture pleine de produits toxiques ?
Et maintenant, un petit focus sur la dernière page du document. Si vous voulez convaincre votre lecteur que votre projet est le meilleur, il faut le démontrer. Si, arrivé au terme de votre « démonstration », vous constatez que vous n'avez pas été assez convaincant, quoi de mieux qu'une petite « infographie » pour fixer les idées ? Celui de la page 19 montre d'un seul coup d’œil que le projet du SEDIF est le meilleur : c'est le seul qui recueille une gommette verte, toutes les autres options se voient affublées d'une gommette rouge. Mais est-ce bien honnête ? Admettons que les gommettes attribuées aux 11 items pour chaque option soient justifiées. Refaites maintenant avec nous ce petit calcul : attribuez la valeur 1 à chaque gommette verte, la valeur 2 à chaque gommette orange, et la valeur 3 à chaque gommette rouge. Faites maintenant la somme de chaque colonne, puis la moyenne en divisant par 11. Que trouvez-vous ? Pour le premier, le projet du SEDIF, une moyenne de 1,45, soit à mi-chemin entre gommette verte et gommette orange. Ils mettent une verte. Bon, mais continuons. Pour la deuxième option, l'absorption sur charbon actif, vous trouvez 1,82, soit entre vert et orange, plus près d'orange. Ils mettent rouge. Tiens ! Poursuivons. Pour la troisième option, la filtration lente, vous trouvez 2,36, soit entre orange et rouge, plus près d'orange. Ils mettent rouge. Admettons encore. Terminons ce petit calcul par la quatrième option, la décarbonatation. Cette fois, vous trouvez 1,91. De nouveau, nous nous trouvons entre vert et orange, plus près d'orange. Ils mettent rouge. Vous avez compris le système ? Il n'y a pas de rapport entre la moyenne que nous calculons et la gommette du bas, qui n'est là que pour faire que le lecteur referme le dossier sur l'impression qu'il n'y a pas d'autre solution que celle prônée par le SEDIF, qui est justement celle sur laquelle la CNDP propose de se prononcer. Comme quoi il faut toujours tout vérifier. Y compris nos propres calculs.
Pour toutes ces raisons, et peut-être encore d'autres que vous découvrirez en étudiant ce dossier, nous vous suggérons de donner un avis négatif à ce projet, et à le faire savoir.
Avril 2023
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