retour page d'accueil

retour sommaire dossier Debus

Le texte du rapport est en noir, nos commentaires en rouge.

 

IRSN

Contrôle radiologique effectué chez la société DEBUS André et Cie. Villejuif (94)

 

Service d’Intervention et d’Assistance en Radioprotection

 

Juin 2 004

 

 

  1. Motif de l’intervention
  2. Sur demande de Monsieur Debus par télécopie du 20 avril 2 004, une équipe du Service d’Intervention et d’Assistance en Radioprotection (SIAR) de l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN) s’est rendue sur le site de la société André Debus et Cie à Villejuif (94) le 27 avril 2 004 afin de procéder à des mesures radiologiques.

    Est-ce un hasard ? Notre association s’est constituée lors de la réunion du 17 avril, un samedi. Monsieur Debus demande une visite de l’IRSN par télécopie le lundi 20…

    La société André Debus et Cie est une entreprise de récupération et de traitement des fers et métaux. L’une de ses activités est le retraitement des têtes d’irradiateur de type " thératron " contenant de l’uranium appauvri.

  3. Historique
  4. Le 19 mai 2 003, le portique de détection de radioactivité de la société METAL BLANC à Bourg Fidèle (08) a déclenché au passage d’un chargement de crasses de fonderie provenant de l’entreprise BUDIN à Aubervilliers (93).

    La DGSNR (Direction Générale de Sûreté Nucléaire et de Radioprotection), informée par la société agréée MERI, relaye l’affaire auprès du STIIC, Service Technique Interdépartemental des Installations Classées de la Préfecture de Police de Paris, qui dépêche deux inspecteurs sur le site de la fonderie BUDIN ; ces derniers constatent que les crasses contaminées proviennent d’un four qui a servi à fondre le plomb contenu dans des têtes d’irradiateurs médicaux de type " thératron " contenant une protection radiologique en uranium appauvri et provenant de l’entreprise Debus.

    A la suite de cette inspection réalisée le 26 mai 2 003, le STIIC demande à l’IRSN (unité d’intervention du Vésinet) de réaliser un contrôle radiologique de l’atelier de l’entreprise Budin.

    Suite à cette intervention, dans son rapport du 24 juin 2 003, l’IRSN préconise une recherche de contamination sur le site de la société Debus.

    Remarquons qu’il n’est fait état d’aucune responsabilité dans la relation de l’accident…

  5. Circulation des têtes d’appareils de radiothérapie
  6. Les têtes d’irradiateur de type " thératron " sont démontées dans les hôpitaux par la société ERTT d’Alfortville (94) qui les transporte chez CISBIO à Gif sur Yvette (91) où la source de cobalt 60 est retirée. CISBIO achemine ensuite les têtes vers la société Debus, où elles sont préparées (retrait des fils électriques, roulements à bille, engrenage, …) puis envoyées à la société Budin.

    Le plomb est fondu puis les têtes sont renvoyées avec la partie en uranium appauvri à l’entreprise Debus qui procède au retrait de la partie en uranium, la conditionne dans un sac en plastique et l’entrepose dans un local dédié. Les parties en uranium appauvri sont entreposées dans les locaux de la société Debus avant d’être éliminées vers le CEA/MCMF à Cadarache. Suite à ces opérations, la carcasse du " thératron " est ferraillée.

    Remarquons les 2 passages dans l’entreprise Debus qui n’apparaissaient pas avant de façon évidente !

  7. Description du lieu
  8. La société Debus se trouve dans une zone résidentielle au centre de Villejuif (94).

    Le bâtiment contenant le local où sont entreposées les têtes de " thératron " se trouve au fond du site (cf annexe 1) (Ce plan annexé fait bien apparaître que la maison qui se trouvait en rénovation récemment est exactement mitoyenne du local en question). Ce local a une superficie de 9 m2 environ. Il est mitoyen avec un local de " soudure " et une maison d’habitation.

    Le toit du local est un toit anti-feu. Ses murs sont constitués de doubles parpaings sauf le mur mitoyen avec le local de soudure qui est en carreaux de plâtre (cf annexe 2) (Ce plan fait apparaître les 2 locaux, séparés par un mur en carreaux de plâtre, et indique que le mur mitoyen avec la maison voisine est de 60 cm d’épaisseur +vide +carreaux de plâtre. Enfin, le mur extérieur formant le 3ème côté est formé de parpaings de 10 cm + vide + plâtre 7 cm). Le sol est constitué d’une dalle de ciment peinte. La porte du local est blindée, fermée à clefs et un trèfle symbolisant la radioactivité (trisecteur jaune et noir) y figure (cf annexe 3). Le local est une ICPE (Installation Classée pour la Protection de l’Environnement).

    Durant l’intervention, il a été constaté que les têtes de " thératron " étaient entreposées dans 3 caisses métalliques fermant à clé.

  9. Déroulement de l’intervention

5.1 Personnes rencontrées sur place

5.2 Matériel utilisé

6. Résultats des mesures

6.1 Contrôles radiamétriques

L’équipe de l’IRSN a tout d’abord procédé à des mesures radiamétriques dans le local et à l’extérieur de celui-ci, à l’aide d’une sonde bas flux et d’un SPP2. L’ensemble de ces mesures est donné en annexe 4.

Annexe 4 : MESURES RADIAMETRIQUES

Les mesures ont été réalisées avec une sonde bas-flux (valeurs en micro sieverts par heure) et un SPP2 (valeurs en c/s [coups par seconde])

Lieu

Débit de dose (micro sievert par heure)

Mesure SPP2 (c/s)

Bruit de fond (cour intérieure Debus)

0,04

25

Entrée local porte fermée à 1 m

0,78

500

Entrée local porte ouverte à 1 m

0,9

600-750

Milieu du local

8,9

 

Contact caisses métalliques

15-20

 

Contact établi

6

 

Lieu

Débit de dose (micro sieverts par heure)

Mesures SPP2 (c/s)

Bruit de fond (cour intérieure Debus)

0,04

25

Contact mur local à soudure

5

1 900 – 2 000

Milieu local à soudure

0,5

 

Bruit de fond (cour intérieure du voisin)

0,07

40

Contact mur voisin

0,07

50

 

6.1.1 A l’intérieur du local d’entreposage

Le bruit de fond a été mesuré au milieu de la cour de la société Debus. Il est de 0,04 micro sievert par heure. Au milieu du local, le débit de dose ambiant est de 8,9 micro sievert par heure et au contact des caisses métalliques, il varie entre 15 et 20 micro sievert par heure.

Comparons avec le compte rendu des mesures effectuées en juin par nos soins dans l’entreprise. Notons d’abord que l’IRSN n’a pas procédé à des mesures caisses ouvertes. Pourtant, lors des manipulations des têtes de thératron, les employés sont exposés au flux non atténué par le métal des caisses. Notre appareil ayant saturé immédiatement, nous n’avions pu fournir qu’une valeur minimum, en signalant que la réalité devait vraisemblablement se situer bien au-delà. Nous ne le saurons pas encore.

Notre appareil ne mesure que les radioactivités bêta et gamma. La radioactivité alpha lui échappe. Nous nous attendions donc à ce que toutes les valeurs obtenues par l’IRSN soient supérieures aux nôtres. Au contact des caisses, nous avions mesuré 6,2 micro sievert par heure, ils trouvent entre 15 et 20, rien que de logique. Au milieu du local, nous avions relevé 0,71 (mais il s’agissait d’une seule mesure, donc pas significative), ils trouvent 8,9, logique. En revanche, ce qui est étonnant, c’est le bruit de fond : eux trouvent 0,04 alors que nous avions trouvé 0,08 à 6 m de la porte, donc également au milieu de la cour. Et toutes les mesures que nous avons faites dans la rue à divers endroits de Villejuif donnent toujours des valeurs qui tournent entre 0,08 et 0,1.

6.1.2 A l’intérieur du local de " soudure " attenant au local d’entreposage

A l’intérieur du local de " soudure ", le débit de dose mesuré au contact du mur mitoyen au local d'entreposage est de 5 micro sievert par heure et n'est plus que de 0,5 micro sievert par heure au milieu de la pièce. Il convient de noter que ce n'est pas un local de travail, l’étain utilisé pour la soudure y est simplement entreposé.

Nous n’avions pas eu accès à ce local lors de nos propres mesures.

6.1.3 A l’extérieur de la société Debus

Une mesure a été réalisée dans la cour de la maison d’habitation contiguë, au contact du mur mitoyen avec le local d’entreposage. Le débit de dose mesuré est de 0,07 micro sievert par heure. Il est de l’ordre des débits de dose ambiants en région parisienne.

Peut-être, mais si la valeur est bien de 0,04 dans la cour de Debus, alors la différence est assez significative avec les mesures faites tant au contact du mur mitoyen, côté voisin, que dans la cour de ce voisin. Cela dénote-t-il une radioactivité supérieure de ce côté ? Cette question renforce notre envie de faire des mesures de ce côté-là. [ Depuis la rédaction de ce texte, nous y avons effexctué des mesures ; pour y accéder directement, cliquez ici ]

6.2 Mesures de frottis

Des frottis (prélèvements surfaciques de poussières) ont été réalisés à l’intérieur du local. Ils ont été analysés a posteriori à l’aide d’une chambre de comptage alpha-bêta dans les locaux du SIAR sur le site du Vésinet.

Les résultats sont disponibles en annexe 5.

ANNEXE 5 : RESULTATS D’ANALYSE DES PRELEVEMENTS

 

Lieu

Activité alpha

Activité bêta-gamma

Nbe coups

A (Bq/cm2)

Nbe coups

A (Bq/cm2)

Bruit de fond

3

 

447

 

Établi

2 061

0,29

14 500

2,69

Caisse

472

0,07

3 483

0,58

Intérieur porte du local

95

<0,04

1 005

<0,4

Mur intérieur

20

<0,04

542

<0,4

Sol ciment extérieur local

70

<0,04

994

<0,4

Sol intérieur peinture local

968

0,14

7 232

1,29

On constate sur ce tableau que l’activité bêta-gamma, la seule qui soit mesurée par notre appareil, est largement supérieure à l’activité alpha, ce qui justifie son utilisation : si nos résultats sont seulement indicatifs de l’activité d’ensemble, ils en donnent une bonne indication.

6.3 Prélèvement atmosphérique

Un prélèvement atmosphérique (6 m3) sur filtre a été effectué à l’intérieur du local d’entreposage, pendant 15 minutes. Le filtre a été compté dans les laboratoires du Service de Traitement des Échantillons et Métrologie de l’Environnement (STEME) de l’IRSN.

Les résultats des prélèvements d’aérosols sont fournis en annexe 6 : l’activité volumique de l’U 235 est inférieure aux limites de détection et celle de l’U 238 (déterminée à partir du Th 234) est de 0,11 Bq/m3.

 

ANNEXE 6 : RESULTAT D’ANALYSE DU PRELEVEMENT ATMOSPHERIQUE

Recherche de radioéléments dans un prélèvement d’aérosols

Thorium 234

Bq/m3

Uranium 235

Bq/m3

0,11 plus ou moins 0,03

<0,0052

 

  1. ESTIMATION DE LA DOSE EFFICACE ANNUELLE POUR LES EMPLOYES
  2. D’après les déclarations de Monsieur Debus, le temps de présence annuel dans le local pour les employés de la société est d’environ 3 heures.

    La dose efficace annuelle pour les employés est la somme de l’exposition externe et de l’exposition interne par inhalation d’aérosols durant leur présence dans le local.

    La dose efficace annuelle par exposition externe, en considérant le débit de dose ambiant dans le local (8,9 micro sievert par heure), est de l’ordre de 27 micro sievert.

    Il semble qu’il y ait là une erreur de raisonnement : les employés ne viennent pas dans ce local pour se tenir en son centre, mais pour y effectuer des opérations, dont certaines sur les têtes de thératron. Ils sont alors soumis au débit de dose non mesuré par l’IRSN, mais vraisemblablement très élevé.

    La dose efficace annuelle interne due à l’inhalation des aérosols est estimée à 25 micro sievert. Cette évaluation a été réalisée en application des dispositions de l’arrêté du 1er septembre 2 003, définissant les modalités de calcul des doses efficaces et des doses équivalentes résultant de l’exposition de personnes aux rayonnements ionisants.

    Ainsi, la dose efficace annuelle pour les employés de la société est estimée à 52 micro sievert. Cette valeur est à comparer à la limite annuelle admissible pour une personne du public, fixée à 1 milli sievert par le décret 2 002-460 du 4 avril 2 002.

    Les employés devraient travailler 19 heures par an dans ce local pour atteindre cette limite.

    Il y a là une erreur de calcul. En effet, les 27 micro sievert d’exposition externe sont comptés pour 3 heures de présence annuelle. Nous supposons que les 25 d’inhalation d’aérosols également, puisqu’ils sont additionnés. La somme donne bien 52. Mais ensuite, on fait la comparaison avec 1 milli sievert, soit 1 000 micro sievert. Cela représente bien 19 fois 52 micro sievert. Cela fait donc 19 x 3 heures, soit 57 heures pour que les employés atteignent la limite, et non 19 heures !

  3. Conclusion

Sur le site de la société Debus, les débits de dose mesurés sont de l’ordre du rayonnement ambiant en région parisienne, sauf à l’intérieur du local d’entreposage des têtes de " thératron ", notamment au contact des caisses métalliques, et dans le local de " soudure " au contact du mur.

Ces débits de dose pourraient avoir un impact à long terme sur les travailleurs.

Les résultats obtenus sur les frottis mettent en évidence une légère contamination à l’intérieur du local, sur un établi, sur les caisses métalliques et au sol. Les mesures effectuées sur les frottis par spectrométrie gamma confirment la présence unique d’uranium appauvri. Les prélèvements réalisés à l’extérieur ne mettent pas en évidence de dispersion de la contamination hors du local.

Le stockage d’uranium appauvri n’a donc pas d’impact à l’extérieur du site.

Avec un soupçon de réserve toutefois : cela ne semble pas être tout à fait le cas dans la maison contiguë…[ Depuis la rédaction de ce texte, nous y avons effectué des mesures ; pour y accéder directement, cliquez ici ]

S’agissant de l’exposition des employés, l’estimation de la dose efficace pour 3 heures d’exposition annuelle est de l’ordre de 52 micro sievert, à comparer à la limite annuelle admissible pour une personne du public, 1 milli sievert (décret 2 002-460 du 4 avril 2 002). Pour atteindre cette limite, le temps de présence dans ce local devrait donc être de 19 heures.

Même remarque que plus haut, la même erreur est répétée.

Au vu de ces résultats, il serait souhaitable :

Monsieur Debus nous avait dit que l’IRSN avait préconisé oralement le port de dosimètres par ses employés. Il est dommage que cette recommandation ne figure pas ici.

retour page d'accueil

retour sommaire dossier Debus

haut de page