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ASSOCIATION
AGIR A VILLEJUIF
RAPPORT D’ENQUETE
SUR LES TRANSFOS AU PYRALENE
1-
Qu’est-ce que le pyralène ?
C’est le nom commercial d’un produit composé
essentiellement de polychlorobiphényles, mieux connus par leur sigle PCB. Il
s’agit d’un produit liquide, huileux, assez visqueux.
2- Quels
sont ses avantages ?
C’est un excellent isolant électrique. Il est très
stable à la température, et peu sensible aux produits acides, basiques et
oxydants.
3- Quels
sont ses inconvénients ?
C’est un produit peu biodégradable : certaines molécules
de PCB peuvent persister des milliers d’années dans l’environnement !
Il est toxique pour l’homme : c’est un perturbateur endocrinien, il a
donc une influence sur la reproduction ; le Centre International de Recherche
sur le Cancer (CIRC) le classe
cancérogène probable, mais certaines molécules de PCB cancérogènes certaines.
Il s’accumule de préférence dans les tissus gras, et voit sa concentration
augmenter à mesure que l’on parcourt la chaîne alimentaire. C’est ainsi qu’on
en mesure en quantité non négligeable dans le lait maternel. S’il y a combustion,
elle doit se faire à température très élevée, faute de quoi, par exemple dans
le cas d’un incendie, on assiste à la formation de dioxines et de furanes.
Les dioxines sont à l’origine de
la catastrophe de Seveso, celle qui a donné lieu à un renforcement de
la réglementation des installations classées, en Europe et en France en particulier.
Pour ces raisons, suite aux actions des associations,
la réglementation impose depuis 1 987 l’interdiction
de fabrication de ce produit.
4- Pourquoi
des transformateurs au pyralène ?
S’agissant de petits transformateurs tels que ceux qui
alimentent les chargeurs des ordinateurs portables ou des téléphones portables
(qui abaissent la tension du courant de 230 à 12 V), il n’est nul besoin de
liquide isolant. Ce sont des transformateurs dits secs. En effet, les
puissances électriques en jeu sont assez faibles. Mais les gros transformateurs
qui transforment l’énergie électrique de forte tension près des lieux
d’utilisation (et abaissent cette tension à 230 V) mettent en jeu des
puissances beaucoup plus importantes, ce qui requiert une isolation permettant
d’éviter les arcs électriques, et donc les incendies. Nous l’avons vu, le
pyralène est très qualifié pour remplir cet office. Mais l’on sait maintenant
faire des transfos secs pour les fortes puissances.
5- Le
décret de 2 001.
Plus précisément, il s’agit du décret
2 001-63 du 18 janvier 2 001. En son article 7-5, il porte :
« …décontamination
ou élimination des appareils inventoriés contenant des PCB qui garantisse leur
décontamination ou leur élimination au plus tard pour le 31 décembre
2 010, à l’exception des transformateurs dont les liquides contiennent
entre 500 ppm et 50 ppm en masse de substances
mentionnées à l’article 1er qui sont éliminés à la fin de leur terme
d’utilisation. »
Le sigle ppm signifie parties par million. 500 ppm
signifie donc 500/1 000 000. Par exemple, 500 g / 1 000 000 g,
ce qui fait 500 g / 1 tonne, ou pour prendre un exemple plus pratique :
500 mg / 1 kg. Le reste est souvent du chlorobenzène.
Il semble que plus un transfo est
gros, plus la concentration en PCB dans son isolant est importante. Il y a là
une logique, puisque plus il est gros, plus il est amené à mettre en œuvre des
puissances importantes, et donc plus il a besoin d’une isolation efficace. Le
décret vise donc les gros transformateurs.
Ceux qui contiennent moins de 500 ppm sont soumis à une
obligation de déclaration dans un inventaire de l’ADEME,
mais peuvent être exploités jusqu’à la fin de leur vie.
Qu’il s’agisse d’une élimination avant fin 2 010
ou en fin de vie de l’appareil, il s’agit d’un déchet dangereux, qui doit être
éliminé comme tel par une entreprise spécialisée.
6- Les
ICPE, rubrique 1180.
La réglementation concernant les Installations
Classées pour la Protection de l’Environnement est plus ancienne, et répertorie
les installations en rubriques selon la nature du risque encouru. La détention
d’un transfo au pyralène relève de la rubrique 1180 :
« Utilisation de composants, appareils et matériels imprégnés
contenant plus de 30 litres de produits. (D) » Note :
le D signifie que l’exploitation de l’appareil peut se faire après une simple
déclaration en préfecture, il n’est nul besoin d’attendre une autorisation du
préfet.
Il existe
12 ICPE rubrique 1180 sur la
liste figurant sur le site de la préfecture du Val-de-Marne pour notre
ville [cliquer sur "fichier des ICPE 94" vers le bas de page] :
7- L’objectif de notre enquête.
Il s’agissait de savoir si le
transformateur utilisé par ces installations est concerné par le décret de
2 001, et si c’est le cas (ce qui devrait être le cas général), a-t-il été
traité conformément aux termes de ce décret ? C’est-à-dire décontaminé ou
éliminé par une entreprise spécialisée.
8- Les résultats de notre enquête.
Contact avec le vice-président
du CES ( ?) de Villejuif. Celui-ci nous répond par téléphone, puis nous
envoie un mail plus précis, dans lequel il indique :
« Les
travaux de dépose du transformateur HT/BT "Paroisse" ont été réalisés
en 2009 par la société IRIS électricité de Villejuif. Le traitement du
pyralène a été effectué par leur sous-traitant. Nous avons profité de ces
travaux pour modifier notre tarif d'électricité avec EDF et désormais nous
sommes raccordés directement au réseau BT. Nous n'utilisons plus de
transformateur HT/BT. »
Nous envisagions de poursuivre notre enquête auprès de la société IRIS électricité,
malheureusement il nous a été impossible de localiser cette société, ni à
Villejuif ni ailleurs dans le département. Concernant le « sous-traitant »,
on verra lors de l’ICPE suivante que ce n’est pas le terme approprié !
2. Centre Paul et Liliane Guinot, 24 boulevard
Chastenet de Géry.
Contact le chargé des affaires générales. Celui-ci nous répond par téléphone,
puis nous envoie un mail plus précis, dans lequel il indique :
« Le transformateur a été remplacé en juillet/août
2008. L'ancien transformateur a été traité par la société TREDI St
Vulbas. »
Le mail était accompagné de la copie des documents liés à l’enlèvement
et à la destruction de l’appareil. C’est ainsi que nous apprenons que le transfo,
d’un poids de 1,5 t, a été enlevé par UAP
(Union des Anciens Porteurs), entreprise de Chatillon, le 25 juillet 2 008.
Le 31 juillet, il a été pris en charge par la SA
TREMBLAYE, du Mans, et acheminé jusqu’à Saint-Vulbas, dans l’Ain, où il
a été remis à la société Tredi
le 4 août 2 008. Celle-ci a procédé à sa destruction, et a remis un certificat
de destruction au centre Guinot. Sur la liste des 16 entreprises habilitées
pour le traitement des transfos au pyralène, 13 ne pratiquent que la décontamination,
seules 3, dont Tredi, procèdent à leur élimination.
L’entreprise Tredi
s’est fait connaître pour la pollution du Rhône par le pyralène. En effet,
elle était autorisée à une époque à rejeter quotidiennement plusieurs kilos
de pyralène dans ce fleuve, et ce durant plusieurs années. Suite à une plainte
de la FRAPNA (Fédération Rhône-Alpes
de Protection de la Nature, affiliée à FNE),
le scandale a éclaté, Tredi va maintenant au-delà de la réglementation pour
faire bonne figure. Mais le Rhône est toujours pollué aux PCB…
3. Monoprix, 34 rue
Jean Jaurès.
Contact téléphonique avec la
directrice du magasin. Elle nous dit que le transfo a été changé en septembre 2
011, puis fouille dans ses papiers, et nous indique que cela s’est fait dans la
nuit du 7 au 8 juillet 2 011. L’entreprise n’était pas de Villejuif. Le
certificat de destruction est en date du 12 juillet 2 011. Evidemment,
nous n’avons pas manqué de demander pourquoi l’enlèvement de cet appareil s’est
fait au-delà de la date limite du 31 décembre 2 010. Elle nous a répondu
qu’un retard de livraison du nouveau transformateur les a conduits à demander
un délai à la préfecture, délai qui leur a été accordé.
4. Collège Jean Lurçat, 37 rue Jean Lurçat.
La principale du collège nous oriente vers le Conseil Général qui est propriétaire
des locaux. Le technicien du Conseil Général, en charge de ce collège, nous
dit que ce transfo n’existe plus depuis plus de 20 ans, puisqu’il est dans
ce poste depuis 20 ans, et que le transfo n’existait déjà plus à son arrivée.
Le Conseil Général a déjà signalé au service des Installations Classées en
préfecture la suppression de cet appareil, sans succès puisque le collège
est toujours classé à ce titre sur le site de la préfecture.
5, 6,11 et 12. RATP
Entre le moment où nous avons débuté notre enquête et la fin de celle-ci,
soit entre septembre et novembre 2 011, les installations de la RATP
que nous avons numérotées 6, 11 et 12 ont changé de statut sur la liste de
la préfecture : elles sont maintenant annoncées « archivées »,
ce qui signifie que les services de la préfecture ont enregistré la mise aux
normes des transfos concernés. Un seul n’a pas obtenu ce statut : le
n°5.
Nous nous présentons au terminus
du métro, et sommes reçus par le responsable du pôle. Celui-ci nous explique
que le courant arrive par câbles souterrains de 67 000 volts jusqu’au transfo.
Celui-ci est en surface (pas très loin du carrefour). Ensuite le courant redescend
au métro à 15 000 volts dans un « redresseur » et alimente les voies
à 750 V et le reste soit en 380 soit en 220 V. Il a parlé de redresseur, peut-être faut-il
comprendre un second transfo ? L’appareil a été changé il y a deux ans,
« j’étais là, un gros engin de cinq ou six tonnes, pas facile à rentrer
dans son local… ». Et les explications qu’il nous donne correspondent
à la dénomination de notre n°5, notamment le sigle PIR. Ce qui fait que la
RATP ne détient plus de transfo au pyralène.
7. Hôpital Paul Brousse, 12 avenue Paul
Vaillant-Couturier.
Notre interlocuteur au service technique est le responsable du matériel électrique.
Il vient d’arriver dans ce service, et n’a pas vécu le changement de transformateur.
Mais il sait qu’il y avait plusieurs transformateurs au pyralène, qui ont
tous été remplacés, en 2 009 ou 2 010, soit avant la date limite
fixée par le décret, par des transfos secs.
8.
INSERM. U 236. U 506, 12 avenue Paul Vaillant-Couturier.
Sur place, nous avons été reçus
par un directeur d’unité. Nous apprenons que les deux unités de l’INSERM
mentionnées sur la liste de la préfecture n’existent plus, remplacées par
d’autres. Le transformateur au pyralène serait toujours en place, mais pour
en savoir plus, il nous propose de joindre le responsable immobilier à la
direction régionale de l’INSERM.
Celui-ci nous indique que ce transfo
alimentait les 3 bâtiments de l’INSERM au sein de l’hôpital
Paul Brousse, mais que suite à un problème, il n’était plus en fonction,
et c’est l’hôpital qui alimentait l’INSERM en énergie électrique. Actuellement,
des travaux sont prévus qui devraient permettre la réalimentation de l’INSERM
par un matériel propre. 2 mois d’étude sont prévus, suivis de 10 mois de travaux,
au terme desquels le transfo au pyralène doit être éliminé par une société
habilitée. Nous émettons l’hypothèse que même dans le cas où un tel appareil
n’est plus en fonction, son enveloppe extérieure peut se corroder et le liquide
fuir, que pour cette raison un bac de rétention de ce liquide doit être posé.
Mais il ignore si tel est bien le cas.
Si nous voulons avoir une
certitude concernant l’élimination de ce matériel, il convient donc de le
recontacter dans un an, ce que notre interlocuteur accepte très volontiers.
Nous lui expliquons que nous avons
rencontré au cours de notre enquête le cas d’une installation qui n’avait
pas réussi à se faire livrer un appareil de mêmes caractéristiques dans les
délais impartis (le fameux 31 décembre 2 010), et qui avait obtenu un
délai de la part du préfet. Le responsable immobilier croit qu’une déclaration
a été faite à la préfecture, mais ignore si un délai a été accordé officiellement.
9.
CNRS. IRSC, 16 avenue Paul Vaillant-Couturier, 7 rue
Guy Môquet.
Nous sommes reçus par deux personnes du service intérieur, dont le conducteur
de travaux. Ils nous apprennent que les transformateurs du CNRS
ont tous été changés pour des transformateurs secs, le dernier en date l’ayant
été en 2 010, soit avant la date limite fixée par le décret.
Bien que très proches géographiquement des bâtiments de l’INSERM, le CNRS
possède sa propre alimentation électrique.
10. Centre hospitalier Paul Guiraud, 54 avenue de la République.
Contact téléphonique avec le responsable
de l’électricité au service technique. Celui-ci nous indique que le centre
hospitalier utilise 4 transformateurs, et qu’à sa connaissance ils respectent
la réglementation, qu’ils ont été changés depuis longtemps. Ne se souvenant
plus de la date de cet échange, il propose de nous rappeler pour lui laisser
le temps de la recherche. C’est ce qu’il fait, pour nous indiquer que les
appareils au pyralène ont été enlevés et détruits il y a 8 ans, soit peu de
temps après la parution du décret de 2 001.
9- Conclusions.
Première remarque : notre
enquête a une limite évidente : nous n’avons en tant qu’association aucun
moyen de contraindre nos interlocuteurs à nous fournir la preuve de ce qu’ils
avancent. Cela étant, nous n’avons trouvé que des interlocuteurs aimables,
cherchant à nous renseigner au mieux, nous faisant patienter, ou nous rappelant
même, pour nous fournir une précision de date. Sans compter celui qui nous a
proposé le scan des documents concernant l’enlèvement puis l’élimination de
l’appareil.
Deuxième remarque : la
liste figurant sur le site web de la préfecture est parfois mise à jour,
puisque nous avons noté le classement en archives de 3 des 4 ICPE de la RATP
entre le début de notre enquête (fin septembre 2 011) et la fin (début
novembre 2 011). En revanche, d’autres ICPE qui auraient dû, d’après nos
informations, être archivées, tout au moins en ce qui concerne la rubrique
1180, ne l’ont pas été, quand bien même la disparition de l’appareil est
effective depuis plus de 20 ans, comme dans le cas du collège Jean Lurçat…Un
petit effort de rigueur de la part des services de l’Etat ne nuirait à
personne !
Troisième remarque : sur
les 12 ICPE répertoriées, nous constatons la disparition des appareils (parfois
plusieurs par installation), à l’exception de l’une d’entre elles. Et non des
moindres, puisqu’il s’agit d’un grand organisme public, qui plus est en charge
de problèmes de … santé ! Il s’agit bien sûr de l’INSERM. Le fait que cet
appareil ne soit pas en fonction ne change rien à l’affaire, puisque le décret
du 18 janvier 2 001 porte explicitement élimination des PCB, et non des
seuls appareils en fonction qui en contiendraient. Evidemment, il convient de
vérifier l’information que nous donnait notre correspondant, et si elle est
avérée, obtenir au plus tôt l’application de la réglementation. Pour cela, nous
envisageons de nous tourner vers le préfet qui seul peut nous donner la réponse
et agir dans le sens souhaité.